J-7

La date approche, celle qui signera le début de cette nouvelle vie, tout autant espérée que redoutée

Lundi 10 juillet 2017 je ne serais plus la même femme.
Lundi 10 juillet 2017 je ressortirai mutilée mais satisfaite du bloc opératoire.

Le médecin a fait le choix de la sleeve, je n'avais pour ma part aucune idée préconçue quant au choix de l'opération.
Mon estomac va donc, dans une semaine, se retrouver réduit au moins des 2/3.

Je sais pourquoi je fais le choix d'une chirurgie bariatrique.

• La nécessité d'en passer par cette extrémité pour ne pas voir ma vie écourtée et remise en cause par différentes maladies directement liées à l'obésité.
• Le besoin de pouvoir vivre au quotidien sans ce “sac” de 60 kilos qui accompagne le moindre de mes gestes, qui accompagne aussi mon sommeil. Peu sont ceux qui ont conscience de l'énergie nécessaire au déplacement quotidien d'une telle masse, et pourtant croyez-moi c'est usant.
• Le besoin de pouvoir jouer, courir, bouger avec mon fils sans que cela se transforme en supplice.
• Le besoin aussi de ne plus être hors norme.
• L'envie enfin de moins me déplaire physiquement.

Mais je sais aussi que cette opération n'est pas une opération de chirurgie esthétique, qu'elle n'a rien de miraculeux et que ce n'est que le tout début d'un chemin fait d'inconnus et d'interrogations. Simple porte franchie en direction d'une vie totalement transformée. Simple gong de départ pour une course d'endurance qui durera des années, peut-être même toute une vie.

Et c'est cela qui m'inquiète ces derniers jours. Serais-je capable de gérer tout cela ?
Prévoir 5, 6 peut-être même 7 repas par jour pour pouvoir pallier le manque d'apport nutritionnel dû au rétrécissement de l'estomac.
Accepter que la nourriture, au moins la 1ère année ne soit plus un casse-tête et une angoisse qu'une source de plaisir.
Voir ma vie se focaliser sur cette même nourriture alors qu'il faudrait à terme que la nourriture ne soit plus un enjeu.

Et ça dans un premier temps.

Viendra ensuite le temps de mon regard sur mon propre corps. Même si je n'aime pas mon corps aujourd'hui, ses formes et ses déformations, c'est le mien. C'est celui auquel je me suis habituée depuis très longtemps.
30 ans de surpoids puis d'obésité, 30 ans d'un corps hors norme, 30 ans que chaque regard dans une glace me renvoie cette image du trop gros, trop gras.
Et d'ici quelques mois, ce trop gros, ce trop gras ne sera plus, ou tout du moins il le sera bien moins.

Comment faire face à ce changement, comment transformer sa propre image mentale ?

J'ai 46 ans, j'ai commencé à prendre du poids, beaucoup de poids à l'âge de 15 ans. Ça implique que je n'ai jamais eu un corps d'adulte avec un poids normal.
Je ne connais pas cette future femme que je vais devenir. Je ne dois pas la retrouver, je dois la devenir.

Je lis que nombre de personnes étant passées par ce type d'opération n'arrive pas à prendre conscience de leur amaigrissement.
Les chiffres indiqués sur la balance le leur prouvent.
La taille des vêtements qu'ils portent le leur démontrent.
La facilité de mouvements retrouvée les renseignent.

Et pourtant… pourtant ces personnes se sentent toujours obèses.
L'appropriation de leur nouveau corps semble très difficile voir impossible.

L'aide d'une psychothérapie sera-t-elle suffisante pour appréhender mon nouveau moi ?
Cela permettra-t-il aussi d'accepter un corps abîmé par cette perte rapide ? Cette peau en excès qui deviendra superflue mais qui pourtant sera toujours là me sera-t-elle supportable ?

À moins d'une semaine de l'opération ces questions se bousculent et se multiplient. Mes rêves se focalisent sur cette perte de poids tant espérée. Mes cauchemars aussi.

Je m'apprête à voir disparaître l'adulte que j'ai toujours été et j'ai peur.